Au départ de XI Jinping, ce fut un désarroi dans cette salle d’apparat qui devenait noire. Le n’importe-quoi était à son comble : la fille de M. Piano se débarrassait de son vêtement pseudo chinois, oubliant qu’elle ne portait rien dessous, elle était charmante, le petit-fils apparut tout à coup en haillons de morts-vivants dégoutants et dégoulinants, pour mettre un peu de piment à la scène, Mme Piano préparait un risotto pour une raison dont elle ne se souvenait plus mais que les lecteurs peut-être se rappellent. Seuls à garder leur superbe, M. Piano demeurait un panda intraduisible et l’aigle un magnifique et incorrigible discoureur ailé au bec fin.
« Supposons, disserta cet aigle, que je traduise sincèrement ce que Xi ne vous dit pas, tel serait le message : nous avons l’idée, ici, en Chine, d’accoler les contradictions, sans les résoudre en puérile dialectique. Nous sommes à la fois communistes et partisans du marché libéral, prônant à la fois les identités régionales et les échanges mondiaux, la dictature et la démocratie. Nous ne connaissons en réalité que les divisions, ou plutôt une unité soudée mais formée d’éléments qui se détestent, se méprisent, de clans qui ne parlent pas la même langue, n’ont pas les mêmes manières, les mêmes racines, de classes sociales opposées, en lutte, qui ne peuvent communiquer. Or, de ce désordre actif nait un ciment commun, bien différent d’une cohérence artificielle en usage dans les pays occidentaux, où s’agite l’illusion des intégrations, des partages, des assimilations, des tolérances, au nom d’une universalité qui ne correspond en rien à l’Histoire humaine. Détestez-vous, et vous vivrez bien ensemble. »
L’aigle se tut car il reçut sur le bec le risotto cuit de Mme Piano qui donnait des coups de sac sur les fesses sa fille nue. Par éviter d’autres coups, le petit-fils s’habilla en révolté des banlieues, Piano-panda criait toujours Yahouououou, j’embarquais cette famille éclatée dans un avion vers Paris, déposait M. Piano au Zoo de Vincennes. Hélas aucun panda ne saisissait sa langue, jusqu’au moment où un vétérinaire eut l’idée de génie de lui ôter son costume poilu, puisque l’habit fait la parole.
— Bon sang, rugit Piano en mots audibles, vous êtes sourds, depuis des jours je vous criais que nous n’étions point en Chine dans un conte de Voltaire pour écouter des philosophies politiques, mais à Disneyland !
Vilaines Pensées 197 : L’aigle de XI (4)
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