Je suis surpris que FC, en ses Pensées fort vilaines, n’utilise pas davantage Clavecin, le petit-fils de M. Piano, qui prend pour modèle de vie non point des acteurs de chair et d’os comme nous mais des personnages de dessins animés. FC n’évoque que le minimum de ses transformations possibles, en Dragon trop souvent, ce qui est amusant mais un peu court.
Pourtant, ce Clavecin, aussi imaginaire que nous, a bien d’autres cordes en son arc, en son art. Il use, plus souvent qu’une tête de Dragon, d’autres images plus quotidiennes, plus terribles : il devient sans cesse chat, bison, rat, mouette, anguille, selon ses fantaisies, ses sentiments.
Mais surtout, tel donc tout personnage de dessins animés, il possède cette qualité magnifique de toujours trouver dans ses poches ce dont il a besoin : des pinces à sucre, des lassos, des cafetières, des fers à repasser, des révolvers, des chevaux à bascule, des pétards, des brosses à reluire.
Enfin, et toujours dans la logique de ses modèles allégoriques ou délirants, notre Clavecin a le don merveilleux d’être indestructible, de se relever indemne de son trou après avoir reçu une enclume sur le corps.
Au fond, je crois que FC est assez dépité d’avoir découvert, en une personne réelle, l’illustration de ses théories sur l’avenir de l’humanité, dont il croyait être l’unique prophète. D’autant plus que ce fut M. Piano qui les exposa lui-même, en montrant au public son phénomène de petit-fils, lors d’une fameuse et houleuse conférence à l’université de Naples :
« Le fruit de la chair de ma chair, clamait-il pompeusement, est sans aucun doute la démonstration vivante d’un Etre Post-Humain : il signale sur son visage son appartenance à l’animalité, il conserve en ses poches de kangourou toutes les techniques actuelles et futures, il est devenu immortel. La preuve, quand en France nous fûmes pris en otage par certains gilets jaunes qui haïssaient nos savoirs, nos richesses, nos désirs de progrès, Clavecin saisit dans son propre gilet les clefs adéquates pour s’enfuir de la prison, et fut insensible aux tirs des fusils de chasse de nos geôliers. »
FC sortit en catimini avant la fin de cette fabuleuse conférence. Oui, décidément il est mauvais joueur et n’accepte pas que même ses amis les plus proches racontent mieux les illusions de la vie. — Je crois ne pas beaucoup aimer mon petit-fils, lui avoua Mme Piano. — Hélas, moi je l’adore, lui répondit FC. C’est du moins ce que me rapporta une souris.
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Vilaines Pensées 200 : A quoi sert un Clavecin ?
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