Pour le 25 décembre de cette année 2019, Mme Piano qui en avait assez d’adhérer aux élucubrations de féministes qu’elle jugeait rétrogrades dans leur désir de remplacer les mâles avec des attitudes tout autant viriles, dominatrices et bornées, vint rejoindre son époux au dix-huitième siècle.
Sa fille, je ne sais plus si l’on a pensé à lui donner un prénom, vint également rejoindre le père Piano : elle aussi en avait par dessus la tête du vingt-et-unième siècle, assez de jouer à la pédégette énervée d’une fabrique de confitures aux bananes, pourtant florissante. Et le petit-fils Clavecin suivit sa grand-mère, sous la forme d’un chat de dessins animés. Quel ennui, les laborieuses généalogies des romans réalistes !
Ne me relisant jamais, ne relisant que Borges, Swift et Kafka, je ne sais plus si le père de Clavecin a été évoqué sous ma plume ou sous le clavier d’autres auteurs. Admettons qu’il existe : il était là, et avec une barbe.
Disons qu’étaient également là, emmenés par mes soins, le chien d’Asie Tengo-san, poète et métaphysicien, ainsi que l’âne astrophysicien, Wolfgang von Picotin. « Miaou ! » fit Clavecin-chat, ronronnant et content d’admirer cette ménagerie d’humains, d’animaux et d’illusions devant une vaste cheminée où flambait un feu nourri par des domestiques avenants.
Bref, la tribu des Piano et leurs proches amis résidaient dans un château classique au cœur d’une prairie un peu boueuse, parsemée d’arbres aux bras secs, en cet hiver. Quelle plaie, les descriptions d’un roman réaliste !
La première surprise de Mario Piano, venant d’un siècle vulgaire et amnésique, et s’installant au temps d’un régime dit « ancien », fut de constater ce qu’aucun historien ne put apprécier de son vivant, ou ne put ensuite évoquer en racontant une Histoire passée : l’extrême érudition des domestiques, des artisans, des jardiniers, de ce qu’on appela plus tard les gens du peuple. Ils et elles, surtout elles en vérité, avaient lu Rabelais, Montaigne et Descartes, s’enthousiasmaient pour Lesage ou Crébillon fils, instruits par quelques curés fort éloignés de l’église officielle.
Notre Piano eut un gigantesque plaisir à bavarder avec eux, mais son esprit critique le poussa à côtoyer aussi…
(Qui Piano côtoya aussi ? La suite demain matin.)
Vilaines pensées 233 : Un Noël avec les Piano (1)
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