blog de François Coupry

Mes dernières Vilaines Pensées

Vilaines Pensées 242 : Comment modifier l’avenir dans le passé ?

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Ainsi donc, M. et Mme Piano, leur fille, leur petit-fils Clavecin, l’âne astrophysicien von Picotin, le chien métaphysicien Tengo-san, depuis Noël dernier se prélassaient au dix-huitième siècle, en un château bien sûr, je n’allais pas les entasser dans une masure, fuyant un vingt-et-unième siècle trop compliqué. Mais Monsieur Piano adorait les complications. Il aimait, devant un petit public de bourgeois et de paysans, raconter un avenir qu’il connaissait, comme s’il le prédisait. Il faisait attention à ne point s’écarter de l’Histoire officielle, de sa propre expérience, mais parfois sous le tilleul à l’ombre du château il dérapait, et un jour il annonce qu’en 1940 la Camargue, en France, niera la guerre, s’isolera du reste du monde. Il dormit mal, cette nuit-là. Devant lui, von Picotin...

Vilaines Pensées 241 : Le dégoût de la guérison

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Dès son enfance, Lyghall Borgrave fut protégé de la mort. Par une mère abusive qui le confina dans des rites de précaution, de lavage des mains et du derrière, sous l’autorité d’une nurse qui, cinquante ans avant une célèbre pandémie, portait déjà quotidiennement un masque. On peut s’étonner qu’il survécut à cette prudence qui ne prédisposait point son corps à lutter contre les maladies, mais elles furent bénignes, il eut une santé de fer. Devenu enfin adulte, afin de profiter de cet état de grâce, et pour savoir jusqu’où il pourrait braver le sort, il ne visita aucun médecin, même s’il se sentait gravement patraque, et il négligea toute sécurité sociale : ces économies l’enrichirent, il bénéficia d’autant mieux de sa fortune. Mais voilà qu’en ce beau printemps 2020, un virus que l’on ne...

VILAINES PENSÉES D’UNE HUMANITÉ ENFERMÉE – FIN (17)

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De Laputa à Lilliput, de la Syldavie à la Cacanie, et jusqu’au pays des Houyhnhnms, ce monde est devenu non seulement un ballet, un jeu, mais aussi une eau trouble où, pour éviter de boire la tasse, de respirer le coquin virus, on se déplace lentement dans des scaphandres qui protègent la tête sous des casques lunaires, les mains sous des gants, le buste et les jambes sous des combinaisons blanches et hermétiques. Il est maintenant impensable de se montrer nu à un inconnu, de s’aimer physiquement, même avec une archaïque capote. Et jouir est compliqué : on invente ainsi des cabines de plaisir où chacun est séparé du méchant mais désirable autrui par une paroi transparente, aseptisée, protégeant de tout souffle, pour se toucher soi-même en admirant la nudité, l’offrande du partenaire. Et...

VILAINES PENSÉES D’UNE HUMANITÉ ENFERMÉE – V (14)

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Au rituel des bâtons pour écarter son prochain, s’ajoute celui de la coutume orientale des masques afin d’empêcher les haleines d’aller prendre l’air. Ainsi les rues, autrefois superbement vides, sont bientôt repeuplées de multitudes de visages que l’on avait oubliés durant le temps béni du confinement, au milieu d’automobiles qui ressortent du jour au lendemain des garages ou des égouts citadins où on les avait également oubliées. Mais tous ces visages, au contraire des automobiles, sont inconnus, autant que le virus qui cause ces bouleversements : ils sont masqués, concrétisant jusqu’à la caricature la véritable passion de l’être humain, l’art de la dissimulation. Et c’est un grand plaisir, un apaisement, que d’avancer ainsi masqué, sans avoir hypocritement besoin de se composer une...

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